Doctrine départementale REUT

Mis à jour le 01/07/2024

I. Préambule

La réutilisation des eaux usées traitées et des eaux non conventionnelles (REUT) peut permettre de limiter le recours à l’eau potable pour des usages qui ne le nécessitent pas. L’enjeu sanitaire reste néanmoins prégnant et le cadre réglementaire permet de garantir la protection des personnes face au risque de contamination, notamment bactériologique (usagers directs, riverains, consommateurs…). Cette économie, lorsque la réutilisation vient en substitution d’un usage existant, peut également, dans certaines conditions, participer à la résorption du déficit quantitatif de la ressource en eau. Les services de la mission inter-services de l’eau (MISEN) se sont dotés d’une doctrine précisant les conditions de la mise en œuvre de la réutilisation des eaux usées traitées et des eaux non conventionnelles, ainsi que les modalités de l’articulation de cette REUT avec les attendus des projets territoriaux de la gestion de l’eau (ou plans de gestion de la ressource en eau), lesquels sont définis à l’échelle des bassins versants ou des nappes souterraines, avec pour objectif de restaurer l’équilibre quantitatif des milieux à travers des actions d’économies d’eau, d’optimisation des usages et, le cas échéant, de substitution.

II. Éléments de doctrine

1 - Précisions sur l’encadrement réglementaire des usages

Tout projet de réutilisation qui n’entre pas dans le champ d’application de la réglementation est considéré comme interdit, sauf s’il entre dans le champ d’une autre réglementation. C’est le cas notamment des usages à partir d’eaux usées traitées provenant de systèmes d’assainissement traitant moins d’1,2 kg DBO5 / jour (soit 20 EH).

À noter également que l’usage agricole d’eau chargée en nutriments sans traitement préalable ne constitue pas une réutilisation d’eaux non conventionnelles, mais répond plutôt à une logique d’amendement ou de fertilisation des sols, et sera par conséquent encadré par la réglementation relative aux épandages. La réutilisation pour usage interne au sein d’une station de traitement des eaux usées ou d’une installation classée pour la protection de l'environnement (ICPE) est encadrée par l’acte réglementaire encadrant la station ou l’ICPE, et ne fait pas l’objet de procédure spécifique.

2 - Points de vigilance en lien avec l’équilibre quantitatif des milieux

a) Sur le choix des projets : compatibilité avec le plan de gestion de la ressource en eau pour les secteurs en déficit quantitatif

 

L’intérêt de la réutilisation des eaux usées traitées et eaux non conventionnelles est conditionné au fait de soulager une masse d’eau en déficit quantitatif. Elle doit donc s’accompagner d’une réduction du prélèvement dans une masse d’eau déficitaire, sans aggraver le déficit d’une autre masse d’eau. C’est pourquoi les projets de réutilisation devront prioriser les usages existants, en substitution de ressources en déficit, plutôt que d’accompagner le développement de nouveaux usages, afin d’être cohérent avec la démarche de réduction des déficits engagés sur le territoire.

Ces éléments seront particulièrement importants dans le cas de réutilisation d’eaux traitées rejetées en cours d’eau : les projets de territoire pour la gestion de l’eau (PTGE) ayant intégré les rejets des stations d’épuration dans l’hydrologie des cours d’eau, la réduction des apports au milieu, dès lors que l’équilibre quantitatif n’est pas restauré, ne pourra être autorisé que dans de rares cas.

L’intérêt maximal de la réutilisation des eaux usées traitées concerne les stations de traitement qui rejettent aujourd’hui en milieu marin. Il est donc demandé que la même réflexion soit portée pour des réutilisations d’eaux traitées rejetées en milieu marin, afin qu’elles participent prioritairement à la résorption des déficits plutôt qu’au développement de nouveaux usages. Le projet de réutilisation des eaux usées doit être compatible et cohérent avec les objectifs de réduction des déficits et de retour à l’équilibre, objectifs pilotés par les PTGE. Ainsi, tout projet de REUT fera l’objet d’un avis de l’instance qui pilote le PTGE concerné (CLE ou commission locale de l’eau, comité rivière, comité de pilotage dédié), dans un souci de concertation des acteurs du territoire sur ces projets.

Par ailleurs, les projets devront faire l’objet d’une analyse économique et d’un bilan environnemental global permettant d’évaluer leur opportunité : coût et consommation d’énergie du traitement supplémentaire, coût global des installations nécessaires (dont canalisations de transfert, ouvrages de stockage), coût du suivi analytique de la qualité de l’eau, impact du retrait du rejet sur le milieu récepteur (capacités de prélèvement et de dilution en aval), etc., prix de l’eau réutilisée.

Certains rejets de stations constituent la totalité du débit du cours d’eau en période d’étiage. Pour ces stations, listées sur la base d’une expertise de l’Office français de la biodiversité (OFB), aucun projet de réutilisation des eaux usées traitées ne pourra a priori être autorisé, à moins d’une démonstration de l’absence d’impact sur le milieu (substitution sur le même milieu en amont du point de rejet, compensation depuis un autre usage…).

Télécharger Liste des Stations de Traitement des Eaux Usées_STEU_Hérault_vf PDF - 0,08 Mb - 01/07/2024

Le logigramme ci-dessous retranscrit les principaux points à étudier pour que le projet soit compatible avec la gestion structurelle de la ressource en eau, selon que la station de traitement des eaux usées rejette en cours d’eau ou en mer.

Télécharger Logigramme REUT_Station de traitement des eaux usées rejetant en cours d'eau PDF - 0,04 Mb - 01/07/2024
Télécharger Logigramme REUT_Station de traitement des eaux usées rejetant en milieu marin PDF - 0,03 Mb - 01/07/2024

b) Sur les restrictions en période de sécheresse

L’ arrêté cadre départemental sécheresse fixe, selon les usages et les niveaux de gravité, les restrictions qui s’appliquent par zone d’alerte. La réutilisation des eaux pluviales récupérées est exonérée des restrictions sécheresse. En revanche, la réutilisation des eaux usées traitées ou des eaux non conventionnelles (REUT) est soumise aux prescriptions « sécheresse » prévues par l’arrêté préfectoral spécifique encadrant la réutilisation.

----------------------------------

Contenu des dossiers

Les textes réglementaires précisent le contenu minimal des dossiers de demandes de réutilisation d’eaux usées traitées ou d’eaux non conventionnelles (REUT). Les éléments suivants viennent préciser certains attendus :

1. Analyse des risques sanitaires

À venir : contenu minimal de l’analyse des risques sanitaires attendu par l’Agence régionale de santé (ARS).

2. Prise en compte du plan de gestion (ou projet de territoire) de la ressource en eau (PGRE/PTGE)

Le dossier devra identifier, selon les usages de l’eau prévus :

- Si les usages sont existants : l’identification de la ressource substituée et les volumes concernés mois par mois. Si la ressource substituée provient d’un milieu indépendant de la ressource de substitution (rejet de station d’épuration), le dossier devra identifier le gain global par rapport à la situation de chaque ressource (ressource de substitution et ressource concernée par l’usage), et chiffrer l’impact quantitatif éventuel de cette réutilisation sur les milieux impactés.

- Si les usages sont nouveaux : un argumentaire justifiant le développement de nouveaux usages, et notamment leur cohérence avec le PTGE et/ou avec l’enjeu de l’adaptation au changement climatique. Exemples de projets positifs au regard de l’adaptation au changement climatique : plantations pour restauration du cycle naturel de l’eau avec limitation des ruissellements pour favoriser l’infiltration ; développement d’îlots de fraîcheur, etc. En cas de plantations, les enjeux liés à la biodiversité et à l’adaptation des espèces plantées seront à prendre en compte.

L’étude d’incidence du projet de réutilisation devra se faire à deux échelles : au niveau du milieu récepteur de la station de traitement des eaux usées, et sur la globalité des ressources concernées (de substitution et substituées).

3. Adaptations en cas de sécheresse

Le dossier de demande devra proposer un plan de gestion spécifique en cas de sécheresse fixant, pour les usages prévus, les limitations ou restrictions par niveau de gravité, et priorisant ces usages. Cette proposition sera adaptée à la ressource impactée par le projet. Lorsque le secteur est placé en crise, les usages non prioritaires réalisés à partir d’eaux usées traitées de stations de traitement des eaux usées rejetant habituellement en cours d’eau ne pourront pas être autorisés, conformément à ce qui est défini par l’ arrêté cadre départemental sécheresse. À défaut de proposition adaptée, le service de la police de l’eau pourra se baser sur les restrictions prévues par l’arrêté cadre départemental.

----------------------------------

À découvrir également : le courrier du préfet de l'Hérault, en date du 11 juin 2024, aux communes et aux intercommunalités (EPCI) du département, à propos de la REUT.

Télécharger Courrier-EPCI-REUT-signé PDF - 0,88 Mb - 01/07/2024